Jozsef Reti, portrait

Publié le par Friedmund

 
Les éléments biographiques, photographiques ou discographiques au sujet de Reti sont denrées rares, y compris sur l’inépuisable Internet. Et pourtant Jozsef Reti figure au firmament du chant mozartien, digne héritier de Koloman von Pataky, au rang des tous meilleurs.

 

 

Eléments biographiques


Jozsef Reti naît le 8 juillet 1925 à Ploesti, aujourd’hui en Roumanie. Il commence sa carrière comme choriste du chœur Franz Liszt de Budapest, et est diplômé de l’Académie de Musique du même nom. En 1953, il quitte l’Ensemble Artistique de l’Armée Populaire de Hongrie et intègre l’Opéra d’Etat de Hongrie. Il commence sa carrière par des seconds rôles comme Altoum, Borsa ou Roderigo. Sa carrière prend un virage plus net lorsqu’il gagne deux prix internationaux : le prix Schumann à Berlin en 1956, et surtout, en 1957, le premier prix du concours de chant de Moscou, présidé par Tito Schipa. Il chante cette même année ses premiers rôles importants à Budapest, Ernesto et Almaviva. C’est encore un rôle belcantiste qui lui permet de faire sensation pour la première fois dans le Comte Ory.  Il se voit alors confié tous les premiers plans mozartiens et belcantistes de l’Opéra de Budapest ; lorsque Renata Scotto et Anna Moffo sont invitées à chanter Lucia di Lamermoor à Budapest, c’est bien sûr Reti qui est leur Edgardo. Son répertoire ne s’arrête pas au seul belcanto et est au contraire extrêmement large : Puccini (Des Grieux, Rodolfo), Gluck (Achille, Pylade), Wagner (David) et même Berg (der Hauptmann). Surtout, Jozsef Reti est un remarquable chanteur d’oratorio ; son répertoire inclut plus de 70 parties vocales différentes dans ce répertoire. Il est nommé professeur de l’Académie musicale Franz Liszt de Budapest en 1964 et acquière une réputation notable comme pédagogue. Cette même année il chante pour la première fois en France, ce qui lance une carrière internationale qui le fera chanter dans plusieurs pays d’Europe et jusqu’en Amérique Latine ; il devient également membre à cette occasion du jury du concours de chant de Rio de Janeiro. Il est également décoré de la médaille national Franz Liszt en 1961, du prix Mihaly Szekely (immense basse hongroise) en 1968, et d’Artiste Emérite de Hongrie en 1969. Il meurt prématurément le 5 novembre 1973 à Budapest, à 48 ans seulement.

 

Discographie


La radio hongroise semble disposer d’un nombre de prises important jusqu’ici jamais édité. N’ont été publiées jusqu’ici par Hungaroton que les seules intégrales du Barbiere di Siviglia et de Zauberflöte. Un portrait de Reti a été publié à partir de ces archives que l’on espère voir un jour surgir par un éditeur courageux ; on peut, entre autres, l’entendre dans les neuf contre-ut de la  Figlia del Regimento. Le catalogue de Hungaroton est plus généreux en oratorios, dont une intégrale de la Passion selon Saint Jean… introuvables hors d’Hongrie. J’ai reporté ci-après la liste complète des parutions CD de Jozsef Reti chez l’éditeur hongrois.

Le maigre leg discographique aujourd’hui disponible en France permet de découvrir un mozartien du niveau de Léopold Simoneau ou Fritz Wunderlich, rien de moins. Là où le premier affichait une souplesse tendre et émue et le second le luxe d’une voix somptueuse, Jozsef Reti brille avant tout par la retenue noble d’un chant plus introverti mais d’une classe confondante. La technique est impériale et la maîtrise du souffle permet des dosages de nuances stupéfiants sur le passage : ses airs mozartiens sont ciselés à la manière d’un orfèvre, et laissent loin derrière ses illustres rivaux dans le raffinement musical. La voix est immensément facile, aussi bien dans un aigu très libre (il chantait jusqu’au contre-mi) que dans une vocalise déliée et d’un remarquable soutien (le « Amatae face » de la Juditha triumphans vivaldienne est formidable d’une virtuosité sans aucune fragilité). A cette voix merveilleuse s’ajoute un interprète hors pair. Ses airs de concert montrent une retenue virile et pudique au ton mémorable. Là où nous connaissons la tendresse émue de Léopold Simoneau, Jozsef Reti est un amoureux timide et pudique tout aussi émouvant. Là où un Nicolaï Gedda en fait des tonnes dans « Con ossequio, con rispetto », Reti trouve d’emblée le ton juste et retenu, sans caricature. Quant à son interprétation de « Misero ! O sogno », je ne pense jamais avoir entendu ténor ayant su en rendre la gravité de manière si forte et mémorable. Dans le même esprit, l’introversion du chanteur confère à ses Bach une sévérité certaine, très impressionnante.

Le récital mozartien de Jozsef Reti est un indispensable à tout mozartien qui se respecte. L’album « Wie stark ist nicht dein Zauberton », qui réunit des extraits des intégrales de la Passion selon Saint Jean, de Juditha triumphans et de Zauberflöte, complétés par des airs de ténors de Mozart absent du premier album, une cantate de Bach (« Komm, du süsse Todesstunde ») et un lied et un psaume de Liszt, offre un panorama intéressant de l’art du ténor. Ces deux disques ont le mérite d’être dénichables pour le moment sans difficulté excessive ; ce sont les deux seuls fréquemment distribués en France. Comme rien ne garantit que cela perdure, je ne saurais trop conseiller d’en saisir les rares exemplaires qui circulent à qui ne connaît pas encore Jozsef Reti.

Il est fort regrettable que la relative fermeture du bloc des pays de l’est et une disparition prématurée aient tenu si éloigné ce grand artiste des studios d’enregistrement occidentaux. Il aurait remplacé avantageusement bien des Schreier et des Gedda dans moult intégrales orphelines de ténors mozartiens, une fois Dermota, Simoneau et Wunderlich disparus. Et, à entendre son Ottavio, le seul crédible que j’aie jamais entendu, on imagine quel Tito ou quel Idomeneo idéaux aurait pu incarner cet artiste infiniment viril et noble. Inutiles mais éternels regrets.

Rééditions en CD de Jozsef Reti chez Hungaraton

 

1994 Erkel Ferenc: Bánk bán HCD11376-77

1994 Kodály Zoltán: Budavári te deum, Missa Brevis HCD11397

1995 Bartók: Cantata Profana; Kodály: Psalmus Hungaricus HCD31503

1995 Bartók: Cantata Profana; Concerto HCD12759

1996 Vivaldi: Juditha Triumphans CLD4022-23

1996 Mozart, Wolfgang Amadeus: Airs de concert et d'opéra

1996 Great Hungarian Voices: József Réti HCD12927

1997 Bach, J.S.: Passion selon St Jean BWV245 HCD04024

1998 Wie stark ist nicht dein Zauberton (Bach, Vivaldi, Mozart, Liszt) HCD12891

1998 Rossini, Gioacchino: Il barbiere di Siviglia HCD 12625-26

2000 Bartók Complete Edition - Vocal Orchestral Works HCD31883

2000 Mozart, Wolfgang Amadeus: Die Zauberflöte (extraits) HCD11539

2000 Petrovics, Emil: C'est la guerre; Cantata No.6 HCD31958

2001 Fifty Years of Hungaroton - Singers HCD31096

2001 Mozart, Wolfgang Amadeus: Die Zauberflöte HCD19451 

 

 

Publié dans Oeuvres et artistes

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