Inva Mula, Gaveau, 03/04/2007

Publié le par Friedmund

 

   

Programme  


Fernando Obradors :

« Corazon por que pasais »

« Con amores la mia madre »

« En el pinar »

« Las coplas De Curro Dulce »  

 

F. Liszt :

« Oh ! Quand je dors »

« Pace non trovo »

« Benedetto sia’l giorno »

« I vidi in terra angelici costumi »

 

G. Puccini :

« Si mi chiamano Mimi » (La Bohème)

« Donde lieta usci » (La Bohème)

« Sole e amore »

« Se come voi » (Le Villi)

 

5 Mélodies albanaises

 

Bis  


G. Puccini : « O mio babbino caro » (Gianni Schichi)

G. Verdi : « Sempre libera » (La Traviata)

 

Inva Mula, soprano

Kira Parfeevets, piano

Quatuor Gaudi



Retrouver Inva Mula est un véritable plaisir. La soprano albanaise avance depuis Operalia 1993, discrètement peut-être mais sûrement, dans une carrière exemplaire. Sans doute un des plus beaux lirico actuels, elle s’est imposée comme un des sopranos pucciniens majeurs de notre époque ; le public parisien avait eu le bonheur de le constater récemment lors des Rondine du Châtelet
(1).

Le concert de ce soir, très bien construit, sortait des sentiers battus et se répartissait à égalité entre mélodies d’une part, et airs d’opéras et de zarzuelas d’autre part. La soirée débutait agréablement par quatre arias de zarzuelas de Fernando Obradors : musique charmante, mais pas particulièrement nourrissante, quoique Mula y démontrait déjà toute sa science incomparable du messa di voce, en dépit de pianissimi un peu rebelles dans l’aigu en cette première partie. Le changement de ton et d’implication était palpable pour les quatre Liszt, un poème de Hugo et trois sonnets de Pétrarque, somptueux, interprétés avec autant de ferveur que de sensibilité.

Les deux airs de la Bohème qui ouvraient la seconde partie ont permis de retrouver Inva Mula dans son répertoire de prédilection : émission époustouflante de beauté et de nuances, et phrasés de grande noblesse sans jamais que ne soit trahie en rien la justesse du ton qui sied à Mimi. Du grand art. Le concert a basculé à partir de ce moment là dans une complicité chaleureuse entre l’interprète et le public qui n’a plus faibli jusqu’à la fin du concert : sans manifestation intempestive, la communion était palpable entre un auditoire sous le charme et une diva dont on sait toute la modestie et la générosité. La mélodie « Sole e amore » était pour moi une découverte : reprenant la musique du duo du troisième acte de la Bohème, le compositeur dédicace l’aria littéralement dans ses dernières mesures « a Paganini, G. Puccini » ; Inva Mula était ici parfaite. Conclusion de la partie du programme consacrée au compositeur, le « Se come voi » du Villi, exceptionnel d’émotion, a déclenché des tonnerres d’applaudissements.

Légère attente en milieu de seconde partie : non pas que Mula ait manifesté le moindre caprice (elle est en cela au dessus de tout soupçon), mais désir de sa part de faire une surprise à son public en endossant sa troisième robe de la soirée, une tenue albanaise, pour se mettre au diapason de la dernière partie de son programme. Pour jouer ces cinq mélodies albanaises, le Quatuor Gaudi venait remplacer l’accompagnatrice attentive de Inva Mula, Kira Parfeevets. Loin d’être de simples morceaux un peu anecdotiques, ces mélodies chaleureuses ont offert à Inva Mula un terrain extraordinairement favorable à mettre en valeur toute sa classe musicale, sa sensibilité et son esprit : l’interprète vibrait de tout son être avec cette musique… le public aussi.

Pour terminer cette soirée émouvante, deux bis magiques : « O mio babbino caro », caressant et touchant, et « Sempre libera », fier et glorieux.

J’ai rarement entendu telle complicité entre une interprète et son public, renforcée sans doute par l’intimité de Gaveau. Il me semble important de souligner toute la générosité d’une artiste qui, se produisant bénévolement et, de surcroît, devant une salle loin d’être comble, enchaîne deux heures durant dix-neuf morceaux en quatre langues avec autant de classe vocale et de chaleur retenue mais palpable pour son public. Plus qu’un moment de musique exceptionnel, ce récital distillait un vrai sentiment de bonheur ; mieux, d’humanité. C’est chose rare sur la scène lyrique: j'en remercie Inva Mula du fond du cœur, avec toute la gratitude qui lui est due.

Je profite également de cette chronique pour relayer modestement à ma manière la cause à laquelle s’est bénévolement dédiée Inva Mula ce soir. Ce concert exceptionnel était au profit des Centres de Beauté CEW, association destinée à prodiguer gratuitement des soins esthétiques dans les hôpitaux et développer ainsi le bien-être et l’écoute des patients. Pour de plus amples informations, voici leur site web : www.cew.asso.fr .   

(1)    Inva Mula en Magda : http://operachroniques.over-blog.com/article-5253542.html

 

Publié dans Saison 2006-2007

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