Heppner Wagner (DG)

Publié le par Friedmund


Si l'interprétation de Ben Heppner est d’une constante qualité, je marque quand même une certaine déception à l'écoute de ce nouveau récital du heldentenor canadien. Si son Siegmund est ténorisant, dans la lignée d'un Torsten Ralf ou d'un Franz Völker, il n'en demeure pas moins que ce beau chant est relativement peu imprégné de la puissance expressive que nécessite le rôle. Les trois extraits du premier acte de Walküre se transforment ainsi en un beau cycle de lieder dramatiquement creux. Et le Walhall sait à quel point le ton héroïque et l'urgence sont fondamentaux pour le personnage. Siegfried le trouve plus convaincant car peu ont eu cette facilité vocale, et parce que la voix se prête sans doute plus par sa juvénilité à caractériser le fils que le père. Heppner est sans doute à son meilleur dans le lyrisme de la fin du deuxième acte et de la découverte de Brunnnhilde endormie, où il fait simplement merveille. La propension à rouler les r, déjà notée dans Florestan au Châtelet, devient parfois assez envahissante, d'autant plus que c'est là la seule scorie d'un chant qui brille avant tout par la pureté de la ligne et la beauté de l’émission.  Force est de reconnaitre pourtant que Siegfried n'a sans doute jamais été mieux chanté depuis Lauritz Melchior.  Peter Schneider procure un bel accompagnement orchestral à la tête de la Staatskapelle Dresden, et Burkhard Ulrich procure en Mime une belle réplique à Heppner.
 

Au dela de la prestation de Ben Heppner, j'ai deux réserves artistiques à poser sur le programme. Primo,
 un autocollant sur le CD programme qu'il s'agit de "Siegfried's life" (même en Allemagne ce CD serait-il en import des USA?): pourquoi nous imposer le Rheinfahrt et la Trauermusik, alors que le récit final de Siegfried "Mime hiess ein mürrischer Zwerg" aurait été pour le même minutage bien mieux venu et plus intéressant. Franchement, qui se passionnera pour l'interprétation, certes honorable mais fort dispensable, de Peter Schneider? Secondo, et péché bien plus grave, l'ajout du Rheinfahrt, qui brise le bel enchaînement possible de la fin du "Seliges Öde" avec la mort de Siegfried sur le leitmotiv du Réveil. James Conlon et Ben Heppner, justement, les avait magnifiquement enchaînés à Bastille lors d'un concert il y a quelques saisons de cela.

Je rappelle l'existence du CD EMI de Domingo contenant peu ou prou le même programme, Siegmund en moins mais le duo du Prologue de Götterdämmerung avec Violetta Urmana et le dialogue avec le Waldvogel de Natalie Dessay en plus. Moins bien chanté sans doute, mais autrement plus habité et moderne dans la conception du rôle du jeune Wälsung.

Publié dans Disques et livres

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